+66 milliards d’euros de dépenses publiques en plus en 2021 par rapport à 2020, c’est ce que nous dit la première loi de finances rectificative en discussion actuellement suite aux nouvelles annonces de dépenses d’urgences (pour 15 milliards d’euros) par le gouvernement.
Le déficit public sera cette année le pire que la France n’ait jamais connu ces dernières années avec 9,4% du PIB soit plus qu’en 2020 alors même que la récession était l’an dernier de -7,9%. Le gouvernement attend toujours une croissance de 5% en 2021 mais celle-ci ne remplira pas les caisses publiques à la hauteur des dépenses nouvelles puisque l’augmentation des recettes par rapport à 2020 et attendu à 30 milliards d’euros (43,3% du PIB en prélèvements obligatoires), soit deux fois moins que les dépenses.
Des dépenses de fonctionnement
Les 66 milliards d’euros de dépenses publiques supplémentaires sont loin d’être toutes des dépenses d’urgence ou de relance. Pour plus de 40 milliards d’entre elles, comme le montre le haut conseil des finances publiques, ce ne sont ni des dépenses d’urgence, ni des dépenses de relance mais bel et bien des dépenses de fonctionnement… Faut-il rappeler que les dépenses publiques ont déjà augmenté de 92,8 milliards en 2020 ? La raison est à rechercher dans les colossaux reports de crédits non consommés en 2020 sur 2021 pour près de 28,8 milliards d’euros, ce que curieusement la LFI 2021 ne prenait pas en compte…
D’ailleurs, le déficit qu’on appelle « structurel », c’est-à-dire celui qui n’est pas conjoncturel et lié à la crise plonge lui aussi à cause de la pérennisation des mesures dites « exceptionnelle ». Il passe de 1,3% du PIB à 6,3% mais sans doute plutôt 7,3% du PIB comme le chiffre le Haut Conseil en utilisant le vrai niveau de la croissance potentielle.
S’agissant de la dette publique, celle-ci croit mais se stabilise à environ 117,2% du PIB, contre 116,2% selon le budget 2021 initial. La dette ne croît que de 2,1 points de PIB par rapport à 2021 mais quand on y regarde de plus près, par le jeu de la récession, elle augmente entre 2020 et 2021 de près de 193 milliards pour atteindre 2 843 milliards d’euros.
Autres zones d’ombres, on ne sait pas quelle est la dynamique des dépenses locales, ni des dépenses de sécurité sociales et hospitalières même s’il faut résolument les considérer comme à la hausse. Le Haut Conseil des finances publiques estime cependant que l’objectif du budget 2021 initial pour de l’ONDAM a déjà été dépassé de 9,6 milliards. En cause, la campagne de vaccination, les tests de dépistage et les dépenses des établissements de santé. Les comptes de l’UNEDIC se dégraderaient également à cause de la prise en charge de l’activité partielle et du report de la mise en place de la réforme de l’Assurance chômage au 1er juillet. En cas de maintien, son impact en 2021 serait néanmoins insignifiant : autour 210 millions d’euros d’économies.
Pente dangereuse
Qu’en conclure ? La France s’enfonce nettement sur une pente dangereuse. Les fondamentaux de nos finances publiques sont de plus en plus inquiétants. Ce qui fait dire au Haut conseil des finances publiques dans son avis que : « la soutenabilité des finances publiques appelle à la plus grande vigilance ».
Plus que jamais, une reprise en main sérieuse est nécessaire. Elle suppose de mettre les bouchées doubles pour adopter les réformes relatives aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale qui sont en cours et de définir très rapidement une nouvelle loi de programmation de nos finances publiques crédible et sincère avec des réformes structurelles (la réforme des retraites mais pas que…) planifiées pour les années à venir. Il faut aussi plancher au renforcement du rôle du Haut Conseil des finances publiques, vigie d’une règle de dépenses associée à une règle de désendettement pour chaque niveau d’administrations publiques.